Moins on appuie sur les pédales d’un vélo et moins on avance. Pourtant en cas de fort vent de face ou de côte, si on ne veut pas caler on est bien obligé d’appuyer plus fort. Et comme tout le monde n’a pas la force d’Eddy Merckx, la solution pour réduire les déplacements en voiture c’est le vélo à batterie. Ou plutôt la nouvelle tarte à la crème qu’on trouve partout : à la location comme à la vente. Dans toutes les vitrines des marchands de cycles, le vélo à batterie s’impose au point de relayer les autres modèles au fond des magasins. Et à ce rythme-là il faudra bientôt aller au musée pour voir un vélo classique.
Mais ne nous berçons pas d’illusions : la panacée universelle n’existe pas. 20% du cobalt utilisé dans la fabrication des batteries qui équipent nos ordinateurs et véhicules en tout genre comme nos vélos provient de mines qui emploient des enfants. Et le marché explose littéralement depuis 3 ans. L’Unicef indique qu’en 2017, 40 000 enfants travaillaient dans des conditions déplorables à extraire le cobalt. A cela se rajoute le problème du recyclage des batteries et l’énergie électrique d’origine nucléaire ou fossile qu’il faut pour recharger les batteries. Même si l’impact sur l’environnement est moins fort qu’une voiture il n’est pas nul et reste supérieur à un vélo classique.
Les adeptes du vélo électrique n’en démordent pas : sans assistance électrique ils ne seraient jamais remontés sur un vélo. Et la première raison invoquée c’est que le terrain est loin d’être plat partout.
Il est fort probable qu’ils ne connaissent pas Paul de Vivie qui a inventé le dérailleur vers 1908. Sinon ils n’auraient jamais acheté un vélo électrique. Le dérailleur fait appel au principe de la démultiplication. Pour pédaler moins fort il suffit de recourir à ce principe. Avec le dérailleur, plus vous faites monter la chaine à l’arrière sur une roue dentée de plus en plus grande pendant qu’à l’avant vous allez vers le plus petit plateau, moins vous avancez vite et moins vous avez besoin d’appuyer sur les pédales. Avec un vélo à trois plateaux et 7, 9 ou 10 vitesses à l’arrière vous pouvez monter des côtes à 15% même sans entraînement ! Vous monterez à 5 km/h, et si vous n’accélérez pas la cadence de pédalage vous monterez sans être essoufflé ou tout dégoulinant de sueur en arrivant en haut. A cette allure il vous faudra 12 mn pour monter une côte d’un km et 8 mn de moins en vélo électrique. Le gain de quelques mn ne saurait justifier l’exploitation des enfants dans les mines de cobalt. N’oublions pas, comme nous le rappelle le pape François dans son encyclique Laudato Si’, que notre maison commune est comme une sœur qui « crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. » Quand une réelle alternative se présente à nous, cessons d’écouter les voix des sirènes qui nous poussent à consommer plus, mais cherchons plutôt à mieux utiliser ce que nous avons déjà.
Guy Delage sj