Les soignants si peu reconnus avant que Mr Corona siffle la mi-temps de la mondialisation, ont accédé du jour au lendemain au statut de héros du quotidien.
Sur l’héroïsme il y aurait beaucoup à dire. Le récit de la chute en Gn 3 s’en charge déjà bien. Arrêtons-nous juste un instant sur l’aspect viral de cette maladie de l’âme qu’est l’héroïsme.
Au 21ème siècle le jeu des médias consiste à faire mousser l’héroïsme, pour alimenter un récit collectif. Mais c’est une erreur à plus d’un titre.
D’abord parce que bien des héros parmi les soignants sont des héros malgré eux. Pour la plupart il s’agit plutôt d’héroïnes révoltées, obligées de faire le travail tout en étant en désaccord avec les politiques de santé menées jusque-là. Plus encore que des applaudissements, ces héros-là qui viennent travailler la peur au ventre, préféreraient avoir les moyens humains et matériels pour soigner.
Dans ces conditions, faut-il les applaudir ? Il y a dans ce geste une part d’égoïsme et d’idolâtrie ; sinon on applaudirait aussi les facteurs à 7 h du matin, les éboueurs à 5 h et les boulangers à 2 h et les livreurs à toute heure de la journée.
Les soignants, à la différence des autres, sont là pour nous, pour nous prendre en charge en cas de péril vital. Ainsi nous savons que nous ne serons pas complètement abandonnés. Elle est là notre part d’égoïsme qui cependant n’est pas totale puisque chaque soir à 20 h nous témoignons de notre gratitude.
Mais les soignants sont aussi applaudis parce que dans notre monde la santé est un dieu qui vaut plus que tout l’or du monde. Il suffit de voir la place faite dans la publicité au corps jeune, beau, resplendissant de santé et l’argent consacré par le markéting à la vente des cosmétiques qui, pour la plupart, ne servent à rien. Et tout ce cirque médiatico-consumériste relève bien de l’idolâtrie.
Mais alors que pouvons-nous faire ? Certes rester chez nous pour éviter l’engorgement des hôpitaux et l’épuisement des soignants. Sur le plan spirituel nous pouvons apprendre à vivre, avec un rien d’humilité et un peu du dépouillement que le Christ a connu sur la croix.
Ceci n’est pas réservé aux croyants, car qu’est-ce que croire si ce n’est être animé du désir de chercher à connaître Dieu ?
En ce début de 21ème siècle, il faut reconnaître que ce désir est faible, très faible, presque éteint par le dieu argent et par la consommation de loisirs, de voyages et la recherche de bien-être individuel. Toutefois il ne tient qu’à nous de l’activer ou de le laisser en sommeil. Ce temps du confinement nous offre une chance à saisir.