Docteur devrait faire doctoresse au féminin, professeur – professeuse, mais ces titres ou métiers de prestige ont du mal à se féminiser jusque dans leur dénomination. Il en est d’autres comme infirmières, caissières où le féminin l’emporte même si le masculin existe aussi.
Mais s’il en est un qui se conjugue surtout au féminin c’est bien le métier de femme de ménage. Un homme de ménage relève de l’exception. N’en déplaise aux féministes, dans la spécialité « aide à domicile » il s’établit un rapport dominante dominée qui s’exerce de femme à femme. Et ce rapport de domination est même institutionnalisé.
Prenons par exemple les locaux de l’ULB dont le nettoyage revient à un bataillon de femmes de ménage employées par une multinationale laquelle est présente dans 77 pays et employait 500 000 personnes en 2016 pour un chiffre d’affaires de 10 milliards d’euros.
Depuis les années 80 la tendance est à externaliser les services autrefois intégrés. Ainsi les services publics peuvent se concentrer sur leur cœur de métier et font baisser leurs coûts d’exploitation. Ce principe d’abord très en vogue dans le privé a fini par s’imposer aussi dans le secteur public. Mais dans les secteurs d’activités à forte main d’œuvre, comme le ménage, où les économie d’échelle sont faibles et la diminution des salaires impossibles, la baisse des coûts est un leurre. En fait, ce sont les femmes de ménage qui en font les frais. Et le client ne gagne rien à cause de la multiplication des contrôles qualité.
Dans une administration comme l’ULB la journée de travail commence à 6 h. Pour comprimer les coûts le prestataire fait des économies sur les fournitures mises à disposition des femmes de ménage. Et encore des économies en augmentant la productivité : tous les bureaux de tous les étages doivent être faits tous les jours en jonglant avec des tâches morcelées. Autrement dit : mission impossible, avec en prime le contrôle qualité. A 10 h pause-café interdite, tout comme il est interdit de manger, de fumer ou de travailler avec un MP3 sur les oreilles sous peine d’avertissement. Jusqu’à 11 h 45 il faut garder la même cadence malgré la fatigue qui se fait sentir. Et comme les femmes de ménage ont accès à tous les locaux, en cas de vol les soupçons se portent d’abord sur elles. A midi la pause est de 30 mn pour dîner. Ensuite il faut reprendre au même rythme. A la quarantaine approchant les risques de tendinites, de lombalgies et autres pathologies sont réels, mais il faudra continuer (en théorie jusqu’à 67 ans) avant d’arriver usée, cassée,… à la pension.
Le jour où un scribe a demandé à Jésus : « Quel est le 1er de tous les commandements ? » Jésus lui a répondu : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. » Puis il a rajouté : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
2000 ans plus tard, en Belgique, l’exploitation de notre prochain reste une réalité contraire au commandement de Jésus.
Guy Delage sj